Accueil > Bonus > BONUS : chaînes hôtelières & e-réputation

Temps de lecture : 7 minutes

BONUS : chaînes hôtelières & e-réputation

LA DÉCEVANTE E-RÉPUTATION DES CHAÎNES HÔTELIÈRES INTÉGRÉES

Prenez des chaînes hôtelières intégrées qui ont plus de 100 adresses en France. Cela va jusqu’à près de 400 hôtels ! C’est simple, il y en a 10 en tout. Mais, cela représente tout de même près de 2.600 hôtels.

Consultez les notes d’e-réputation de leurs hôtels, un par un, sur les principales plateformes de réservations hôtelières ou sites d’avis en ligne (Booking, Expedia, Kayak, TripAdvisor, Google, Hotels.com, etc.). Et voyez le résultat.

Qui aurait dit que bien des grandes chaînes hôtelières intégrées présentes en France auraient des notes d’e-réputation pas si bonnes que l’on aurait pu le croire, voire même lamentables pour certaines ? On tombe de haut ! Les idées reçues sont insistantes.

Force vive de l’hôtellerie, elles représentent plus de 3.200 hôtels dans l’Hexagone. Ce n’est que 18 % des hôtels français, mais tout de même 42 % des chambres, car elles ont des capacités moyennes très supérieures à celles des hôtels indépendants, respectivement de 85 chambres par établissement contre 26.

LA FIN D’UNE (RELATIVE) HÉGÉMONIE

Si les chaînes étaient hégémoniques dès les années 1980, ce n’est plus le cas. Leur impact commercial a pris un gros coup de bambou depuis la dernière décennie, à cause de l’avènement d’Internet et des puissantes agences de voyages en ligne (OTAs) comme Booking, Expedia… Ces plateformes ont fortement discréditées les réseaux sur le plan commercial depuis ces dernières années.

L’omniprésence des plateformes en ligne sur le Net, leur méga succès auprès des voyageurs, les budgets stratosphériques en marketing qu’elles dépensent (ce que les chaînes sont incapables de faire), leur dynamisme commercial vitaminé, leur créativité hors norme, leur catalogue incroyablement riche et diversifié d’hôtels, ainsi que leurs garanties aux consommateurs… ont relégué les chaînes au second plan. Surtout les moins connues.

Les indépendants, au contraire, en ont été favorisés, même s’ils ne le reconnaissent pas toujours.

Sur un autre registre, seulement une poignée de marques bénéficient d’une forte à bonne notoriété auprès des clients d’hôtels (voir notre dossier sur la notoriété des chaînes hôtelières). À l’opposé, plus de 8 enseignes sur 10 sont inconnues ou si peu. Or, ce qui est connu des consommateurs (voyageurs) se vend évidemment mieux.

Cet état de fait n’a pas de quoi rassurer les franchisés aux petits réseaux ou à des enseignes récentes (même dépendants de grands groupes hôteliers), qui paient parfois une fortune en redevances et autres commissions, pas toujours (rarement ?) justifiées.

NE PAS CONFONDRE NOTORIÉTÉ ET IMAGE

Ça c’est pour l’aspect quantitatif. Être connu ne signifie pas nécessairement que l’on a une bonne image ou que l’on est apprécié des clients ou du public.

Car pour l’aspect qualitatif, l’entrée fulgurante depuis ces dernières années de l’e-réputation met au grand jour ce que l’on ignorait jusque-là. On avait auparavant une vue déformée des chaînes que l’on croyait souvent au top de la qualité, montrant leurs biceps à longueur d’années et vantant leur excellence.

Déjà, nos études confirment sans surprise que 9 voyageurs sur 10 préparent leurs voyages et leurs séjours via Internet. Et 7 sur 10, une fois qu’ils ont ciblé un ou des hôtels qui pourraient leur convenir, consultent les avis en ligne des autres voyageurs (ainsi que les photos et les notations). Presque 4 clients d’hôtels sur 5 pensent que rien n’est plus fiable que de lire ce que d’autres consommateurs ont choisi de décrire.

Si certains ont des doutes sur la véracité des avis en ligne, il n’en demeure pas moins qu’à partir de 250 à 300 avis sur un hôtel (certains en ont plusieurs centaines à milliers), on peut constater une tendance fidèle à ce que l’on retrouve sur place, lors d’un séjour, conforme aux principaux motifs de satisfaction et de griefs exprimés par les autres voyageurs.

Par ailleurs, en comparant les différents sites de commentaires de voyageurs, que la notation porte sur 5 ou sur 10, on se rend compte que tout est globalement similaire à propos de chaque hôtel analysé. Cela matche !

LES NOTATIONS

La note affichée est, en principe, le résultat final de différents critères auxquels ont répondu les clients d’hôtels : équipements, propreté, confort, rapport qualité/prix, connexion Wifi gratuite, situation géographique, etc. On n’ose penser qu’il peut y avoir de la triche par les plateformes, mais on ne sait jamais…

Pour autant, il ne faut pas nécessairement se laisser impressionner par les qualificatifs dithyrambiques que les plateformes de réservations en ligne collent à côté des notes. Chez Booking, où l’on note sur 10 : par exemple, 9 c’est « fabuleux » (10 % en moyenne des hôtels français ont 9/10 et plus), 8,9 est « superbe », 8,4 est « très bien » et 7,9 est « bien ».

On n’oubliera pas que le job des OTAs est avant tout de faire du commerce — vendre des séjours ­— et qu’ils ne sont pas là pour casser la « marchandise » que sont les hôtels qu’ils cataloguent. Même si les commentaires des « vrais » clients peuvent atténuer cette fanfaronnade…

En réalité, la note la plus basse sur Booking (l’OTA la plus connue) tourne autour de 6 sur 10 (rarement en-dessous) et celle sur TripAdvisor ou Expedia est de 2 sur 5. Si bien que sur le premier, avoir en note médiane moins de 8/10 est moyen à décevant et sur les seconds, cela vaut pour moins de 3,5/5. Obtenir au contraire de 8,5 à 8,9/10 est bien et plus de 9 est très satisfaisant. Avec 9,5/10, on applaudit carrément.

Ce n’est donc pas comme à l’école où la notation va de 0 à 10 !

UN TEST SUR LES GRANDES CHAÎNES INTÉGRÉES

Pour ce qui concerne les chaînes hôtelières intégrées, nous avons analysé les notes d’e-réputation, hôtel par hôtel en France, sur les réseaux les plus importants en nombre d’adresses, pour commencer. Ce sont de facto les plus connus. Il n’y a rien de scientifique dans cette analyse : n’importe quel stagiaire peut réaliser ce travail simple (mais laborieux).

Cela concerne, encore une fois, seulement 10 réseaux intégrés qui y ont plus de 100 adresses dans l’Hexagone (mais qui représentent 81 % de l’offre des chaînes intégrées), sur une centaine d’enseignes concurrentes présentes dans l’Hexagone.

Pour arriver à une telle dimension de parc, il s’agit de marques déjà anciennes, qui comprennent des établissements neufs et surtout moins récents, avec parfois plusieurs générations de produits.

Par-dessus le marché, les hôtels installés depuis le plus longtemps ont plusieurs centaines d’avis en ligne chacun par plateforme, ce qui assoit une certaine fiabilité dans leur classement et qui noie les éventuels faux avis (très minoritaires d’après la DGCCRF), déposés par les hôteliers eux-mêmes (positifs) ou par des concurrents jaloux (négatifs)…

UN CONSTAT QUI NE CESSE DE SURPRENDRE

• Les chaînes qui obtiennent le meilleur score général moyen frôlent à peine 8/10, pour l’ensemble de leur réseau respectif de plus de 100 unités en France. Pour la meilleure enseigne concernée, seulement 29 % des hôtels ont des notes inférieures à 8/10 (moyen à médiocre), ce qui n’est pas si mal. La note la plus haute dans le réseau est 9/10 (4,5/5 sur TripAdvisor et Expedia). Mais au global, toutes enseignes confondues, à peine …5 établissements ont 9/10 (et pas plus de 9) sur les près de 2.600 hôtels scrutés !

• La pire note moyenne observée pour une enseigne se situe à 5,9/10. Il s’agit d’une chaîne en déshérence.

• Dans les réseaux au global les plus négativement critiqués (6 marques sur 10), on compte entre 46 % et jusqu’à 100 % des hôtels avec une note inférieure à 8/10 (voir graphique).

• Enfin, on remarque, presque sans surprise, que plus les chaînes sont dans le haut de gamme, meilleures (mais une note moyenne de près 8/10, ce n’est pas génial) sont leurs notations. Les enseignes économiques et surtout super-économiques sont au contraire les plus mal notées. Ce qui rappelle qu’être moins cher s’oublie vite face à une prestation décevante ou encore qu’un tarif attractif semble conduire à offrir une piteuse prestation. Les notes ont été ramenées à un calcul sur 10 (celles sur 5 ont été doublées) afin de pouvoir réaliser des comparaisons.

COMMENT EXPLIQUER CES SCORES PAS TRÈS ENVIABLES ?

Il peut y avoir plus raisons combinées ou uniques :

1) – LA QUALITÉ, évidemment. Les clients sont tout simplement déçus par le rapport qualité/prix, voire juste par la prestation reçue, tous critères mélangés. Cela peut relever sans surprise de l’entretien, du service, de l’accueil, des prix, etc.

2) – VIEILLISSEMENT DE L’OFFRE : le parc hôtelier de ces grands réseaux, souvent en place depuis longtemps, est vieillissant, voire obsolète chez certains. Cela se constate facilement : de nombreux hôtels de chaînes n’ont pas fait d’efforts de modernisation de leur offre, sinon parfois à peine par un changement de literie et des rafraîchissements cosmétiques cache-misère. Les fonds d’investissement et groupes financiers, qui ont repris beaucoup d’actifs, ne consentent pas davantage à lâcher de l’argent pour rénover l’existant. Ils sont là pour faire du cash vite fait.

Les clients perçoivent nettement cet appauvrissement de l’équipement et le disent clairement. Les jeunes chaînes ont au contraire majoritairement des hôtels récents ou neufs, qui font moins l’objet de mécontentement parce que leur offre moderne tient davantage la route, les notions d’accueil et de service étant plus secondaires dans les avis exprimés.

3) – LES GRANDS, ON AIME LES DÉTESTER (ou on déteste les aimer). Parce que souvent le « small is beautiful » plaît souvent, une défiance se crée à l’égard des grandes entreprises, connues et reconnues, à qui on ne fait pas de cadeau quand cela dérape au niveau de la prestation. On attend d’elles l’excellence comme elles le prônent elles-mêmes dans leurs communications. Cela se voit dans tous les secteurs d’activité.

On s’aperçoit que les clients d’hôtels sont souvent plus conciliants avec les hôteliers indépendants qu’avec les grandes chaînes qui roulent des mécaniques, où l’accueil est jugé moins bon en général, ce que nous rappellent les sondages que nous réalisons régulièrement auprès des voyageurs. Mais, un accueil agréable et un sourire ne peuvent malgré tout pas compenser un produit fatigué et jugé déplorable.

4) – UN DÉCALAGE ENTRE LA PROMESSE ET CE QUE L’ON TROUVE SUR PLACE. La promotion, les photos de clients heureux, les messages et les campagnes de communication promettent le meilleur. Mais, ce n’est pas forcément une promesse tenue une fois que l’on arrive dans les hôtels. On s’imaginait bien autre chose. Cela donne une impression de tromperie. Dur de pardonner. Et pour un consommateur avoir le sentiment d’avoir été trompé par un commerçant appelle à une réaction le plus souvent violente, qui s’exprime alors en partie sur les sites de commentaires en ligne et les réseaux sociaux.

5) – DES PRIX QUI EXPLOSENT : depuis la crise du Covid, les chaînes hôtelières ont annoncé et appliqué une hausse magistrale de leurs prix dès 2022. L’objectif est de répercuter l’inflation des charges (personnel, eau-énergie…) et le remboursement du PGE, qu’elles comptent faire payer à leurs clients. En même temps, dans leur politique de yield management, elles n’ont pas hésité à tripler voire à quadrupler leurs tarifs lors de périodes de fortes demandes. Pour couronner le tout, certaines ont décidé de faire baisser les températures dans les chambres en hiver …officiellement par souci écologique.

Tout cela, les clients des chaînes s’en sont rendus compte. En réaction, soit, ils réduisent leur nombre de séjours dans les chaînes qui déjà ressentent un recul de leurs taux d’occupation, soit ils expriment leur mécontentement sur les plateformes d’avis en ligne.

En somme, Internet a changé le monde — c’est un truisme — et il est désormais compliqué de faire passer des vessies pour des lanternes. Tout finit par se savoir.


Note au lecteur : nous n’avons pas cité les noms des chaînes concernées, car nous ne voulons pas être encore plus désagréables (sourire).

Mark Watkins

Un spécialiste reconnu du tourisme d’affaires, de l’hôtellerie et du marketing touristique

Ces articles pourraient vous plaire

BONUS : panorama de l’hôtellerie en France

Panorama 2024 de l’hôtellerie en France par Coach Omnium — 33e édition annuelle UNE REPRISE CONFIRMÉE POUR L’ACTIVITÉ DE L’HÔTELLERIE…

Lire la suite >

BONUS : pourquoi s’affilier à une chaîne hôtelière ?

S’affilier à une chaîne hôtelière : Intérêt & Mode d’emploi Hôteliers et investisseurs : trouver la bonne chaîne, c’est du…

Lire la suite >

BONUS : OTAs et chaînes hôtelières

QUAND LES OTAs DISCRÉDITENT LE MODÈLE COMMERCIAL DES CHAÎNES HÔTELIÈRES Les chaînes hôtelières intégrées, qui ont vécu longtemps comme des…

Lire la suite >