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BONUS : la restauration d’hôtels
Les restaurants d’hôtels : un souci de longue date
La restauration d’hôtels, c’est ce fameux « mal nécessaire » comme on l’entend dire depuis au moins trente ans. Combien d’hôteliers s’arrachent les cheveux pour trouver la bonne solution destinée à faire fonctionner correctement leur restaurant, encourager les clients hébergés à rester dîner et attirer une clientèle locale, gage de rentabilité.
Car les taux de captage des restaurants d’hôtels demeurent le plus souvent mauvais et les professionnels se cherchent. Et cela ne date pas d’hier. D’autant que ce service, même bien fréquenté, ne dégage pas beaucoup de bénéfices et peut même être furieusement déficitaire, comparé à l’hébergement.
Il faut dire que les hôteliers restent souvent dans un immobilisme crasse concernant cette prestation, avec de vieux schémas ancrés dans le passé où la restauration des hôtels se voulait classieuse et donc parfois hautaine. Dans tous les cas inaccessible, infréquentable. L’image de la restauration d’hôtel reste depuis très longtemps — à tort ou à raison — mauvaise et les clients la fuient quand ils le peuvent, sauf à quelques rares exceptions.
• Faut-il un restaurant dans un hôtel ? Oui, quand l’hôtel n’en dispose pas autour de lui ou encore quand ceux qui existent ne sont pas en harmonie avec la clientèle de l’hôtel. Par exemple, des établissements de restauration rapide quand l’hôtel est inscrit dans le haut de gamme. Car, la clientèle a besoin de pouvoir dîner lors de ses déplacements et l’absence d’une telle solution dans ou à proximité de l’hôtel, peut lui faire perdre des nuitées. Il en va donc du taux d’occupation.
Autant dire que bien souvent un hôtel situé en centre ville pourra se passer de proposer un restaurant. Ses clients aimeront partir le nez au vent pour un dîner dépaysant. Du côté des normes hôtelières, il est dit que seuls les hôtels 5 étoiles doivent donner la possibilité de dîner 5 jours sur 7 ; mais en pratique, cela peut apparaître sous la forme d’un room-service ou d’une petite restauration en salle.
Nous ne parlons pas ici des grandes tables, bien installées, qui ont en complément des chambres ou un hôtel, permettant ainsi les dîners aux clients. Le restaurant est alors l’attraction et l’hébergement n’est qu’un complément périphérique.
Disposer d’un restaurant d’hôtel ne signifie pas pour autant réussir à plaire aux clients hébergés (ni aux autres), d’où les taux de captage fréquemment faibles. Même les restaurants de palaces, avec un chef étoilé médiatisé, sont confrontés aux difficultés de remplissage. Seulement 15 % des clients d’hôtels français et européens interviewés par Coach Omnium en 2022 déclarent dîner souvent au restaurant de l’hôtel où ils se logent (quand il existe). 43 % le font occasionnellement et les autres jamais à rarement (42 %).
Les clients hébergés sont 68 % à être déçus par la restauration d’hôtels au cours de leurs voyages et 79 % rien que chez les clientèles d’affaires, qui sont gros et moyens utilisateurs d’hôtellerie (études Coach Omnium). Quand on ne souhaite pas ressortir ou quand il y a peu d’autres restaurants dans les alentours, le restaurant de l’hôtel semble alors la solution pratique et fonctionnelle pour les voyageurs. Guère plus. Autrement dit, contrairement à des restaurants « classiques », ce n’est pas le nombre de couverts servis qui traduit le succès d’un restaurant d’hôtel …quand beaucoup de ses clients le choisissent par défaut, par paresse de ressortir ou par manque de choix.
Des solutions basiques…
Il existe cependant des moyens et des règles simples pour faire de son restaurant d’hôtel une prestation attirante ou pour le moins digne d’être choisi.
• Concept : un restaurant d’hôtel à succès ressemble à un restaurant à succès que l’on retrouve ailleurs : mêmes codes, mêmes cartes, mêmes gammes de prix, mêmes idées de décors,… il n’a pas et ne doit pas avoir de particularités en tant que tel.
• Se distinguer : le buffet par exemple, plus facile à mettre en œuvre pour un restaurant d’hôtel (qui réutilise celui des petits déjeuners) peut être un concept différenciant avec les autres formes de restauration classique avec service à table. La tendance est également aux « food corners » dans des hôtels-bureaux : buffets permanents en sucré durant l’après-midi et en salé (quiches, tartes salées, charcuterie, fromage,…) le soir. Mais, outre se distinguer, ce n’est pas une prestation capable de fidéliser la clientèle.
• Une entité et une personnalité à part : un restaurant d’hôtel doit avoir une entrée séparée de celle de l’hôtel (donnant sur la rue), un nom et une devanture distincts, un décor différent, des tenues du personnel autres,… rien ne doit l’associer à l’hôtel pour la clientèle extérieure, voire pour les hôtes hébergés, si l’on veut le légitimer et ne pas le dévaloriser.
• Les prix ne doivent pas être en incohérence avec le positionnement de l’hôtel, si l’on souhaite capter au minimum les clients hébergés. En somme, un restaurant économique pour un hôtel économique. Mais un restaurant haut de gamme — dit « gastronomique » — pour un hôtel du même registre risque d’avoir du mal à trouver sa clientèle locale, pourtant si nécessaire pour le rentabiliser.
• Exploitant professionnel : il est rare qu’un hôtelier soit un bon restaurateur ; l’inverse est également vrai. On constate sur le terrain que soit l’hôtel soit le restaurant souffrent d’une incompétence au profit de l’autre offre, le cas échéant. Aussi, voit-on de plus en plus de restaurants situés en rez-de-chaussée d’hôtels être confiés en gestion à un tiers, restaurateur de métier. Cela fonctionne souvent bien et ce dernier travaillera alors avec la clientèle locale, mais bénéficiera également de la clientèle hébergée, tant que faire se peut.
• Carte : 46 % des clients d’hôtels aimeraient trouver des propositions de cuisine régionale ou locale lors de leurs voyages — l’envie de dépaysement et de découvertes —. Une carte allant dans ce sens, entièrement ou partiellement, peut être une option pour toucher ce public. Dans tous les cas, une restauration trop exotique ou trop atypique risque de déplaire, tout comme la cuisine internationale qui uniformise la prestation et la rend ennuyeuse. Les clients d’hôtels veulent passer un bon moment, se détendre et se sentir bien ; il ne sont pas candidats pour vivre une expérience originale ou une aventure culinaire, comme on le croit souvent. Les plats du jour, une cuisine de marché, du fait-maison seront à coup sûr appréciés.
• Simplicité : un restaurant pour la clientèle de l’hôtel doit être simple, facile à comprendre, accessible et sans prétention.
• Horaires larges : si l’hôtel reçoit régulièrement tardivement des voyageurs, il adaptera évidemment les horaires de son restaurant en fonction de cela. Quitte à avoir une carte réduite en fin de soirée ou même un plateau froid, ce que les clients apprécieront après 22 H 30.
Les erreurs courantes :
Le mimétisme et le « me-too » : chercher à copier les formules à succès vues ailleurs, sans en maîtriser les règles et sans authenticité.
La cuisine internationale passe-partout : déjà dit.
Intellectualiser la restauration : c’est souvent l’apanage des chaînes hôtelières qui créent des formules improbables, avec des noms de restaurant et de plats trop complexes, un service alambiqué et un concept qui demande d’être agrégé de psychologie pour être compris. Restons simples et accessibles.
La prétention : ce n’est pas parce que l’on affiche 4 ou 5 étoiles qu’il faut mettre à disposition des voyageurs une restauration prétentieuse, cherchant à imiter (mal) celle des grands chefs.
Le succès et la réussite de la restauration d’hôtels n’ont pas nécessairement de recette, mais beaucoup de bon sens.
Mark Watkins
Sources : sondages réalisés à compte d’auteur et en face-à-face par Coach Omnium auprès des clientèles hôtelières françaises et européennes.